28 octobre 2024
Idées Droit des affaires La Cour suprême du Canada se prononce : pour la plupart des contrats commerciaux, dont les baux, « une entente, c’est généralement une entente »
23 novembre 2018
Par Daniel Frajman
Mes clients commerciaux qui sont locateurs ou locataires commerciaux me demandent souvent si des changements imprévus dans le marché pourront affecter leurs obligations aux termes d’un bail ou d’un autre contrat. Dans les cas où les parties ont négocié, dans une certaine mesure, les modalités du contrat, la réponse est habituellement : « une entente, c’est une entente », ce qui veut dire que de nouvelles circonstances n’en n’affectent pas les modalités.
Ainsi, dans le cas de baux commerciaux, par exemple, mieux vaut se prévaloir d’une clause pour parer à de nouvelles circonstances ou aux imprévus, puisque dans le cas contraire, les modalités du contrat demeureront les mêmes. Par exemple, un locateur commercial pourra se prévaloir d’une clause empêchant la diminution du loyer en raison d’une déflation (on se souviendra qu’une période de déflation a eu lieu pendant la crise de 2008-2009), d’une clause qui tente de restreindre l’usage des locaux dans certaines situations, tel en cas de faillite du locataire (pensons au paragraphe 84.1 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité qui donne la discrétion au tribunal de céder les droits d’un locataire failli à une tierce partie solvable), ou encore d’une clause qui requiert du locataire de fournir des garanties additionnelles (telle une garantie bancaire plutôt qu’un dépôt de garantie), si les circonstances le justifient. Quant au locataire commercial, il pourra, par exemple, se prévaloir d’une clause lui permettant de suspendre l’exploitation commerciale de l’entreprise en raison d’une diminution des ventes (pourvu que le loyer continue d’être payé), ou encore d’une clause lui accordant un droit de premier refus quant à la location des locaux voisins.
Dans son arrêt récent Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited c. Hydro-Quebec, 2018 C.S.C. 46, daté du 2 novembre 2018, (« Churchill Falls »), sur un pourvoi émanant du Québec, la Cour suprême du Canada (la « CSC ») a réaffirmé que dans bien des contextes commerciaux, une entente, c’est une entente. Notons que, dans cette affaire, il s’agissait d’un contrat de fourniture d’électricité et non d’un bail.
Churchill Falls traite d’un contrat conclu en 1969 (expirant en 2041) entre Hydro-Québec (« HQ ») et la Newfoundland and Labrador Hydro Company (« HN ») selon lequel HN s’engage à fournir de l’électricité à HQ, sur une longue période et à taux fixe, et donc à un coût réel décroissant sur le long terme. Depuis la conclusion du contrat, le prix de l’électricité a explosé, ce que les parties n’avaient pas prévu au moment de négocier le contrat. Le contrat aurait généré 27,5 milliards de dollars de profits pour HQ, contre 2 milliards de dollars de profits pour HN. HN a donc saisi les tribunaux pour forcer la révision du contrat, sans toutefois obtenir gain de cause dans Churchill Falls.
Voici quelques-uns des principes sur lesquels la CSC se base dans Churchill Falls pour maintenir les modalités du contrat en dépit de nouvelles circonstances imprévues :
En somme, lors de la rédaction d’un bail commercial, il est primordial d’envisager l’évolution des circonstances entourant le contrat et d’y inclure des clauses traitant de ces changements potentiels. Dans le cas contraire, la CSC nous dit dans Churchill Falls qu’il peut être ensuite très difficile de revoir les conditions du contrat.
N’hésitez-pas à me contacter afin de discuter d’un bail commercial, d’un contrat de vente, d’une convention d’actionnaires, d’une fiducie, d’une fondation ou de tout document lié à la planification fiduciaire ou à des activités commerciales ou de bienfaisance.
Cette publication vise à donner des renseignements généraux sur des questions et des développements d’ordre juridique à la date indiquée. Les renseignements en cause ne sont pas des avis juridiques et ne doivent pas être traités ni invoqués comme tels.