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Transparence au Québec en matière d'actes immobiliers : Les nouvelles règles résulteront-elles en une nouvelle taxe sur les non-résidents ?

9 octobre 2020

Par Daniel Frajman

Le nouveau règlement en vigueur au Québec depuis le 1er octobre 2020, selon lequel les non-Canadiens ayant pris part à un transfert immobilier sont identifiés à des fins statistiques (sans qu'une nouvelle taxe ne s'applique), nous rappelle les impôts fonciers imposés en Colombie-Britannique et en Ontario en raison d'une présumée crise dans les logements abordables, à savoir :

  • la C.-B. a imposée une taxe de 20 % sur la valeur des propriétés résidentielles acquises par des étrangers dans la région métropolitaine de Vancouver et certains autres quartiers populaires, laquelle s'applique, par exemple, essentiellement lorsque l'acheteur est un étranger ou une société étrangère;
  • la C.-B. a également imposée une taxe de 2 % sur la spéculation et l'inoccupation de propriétés dans la région métropolitaine de Vancouver et certains autres quartiers populaires (ainsi qu'une taxe additionnelle d'environ 1 % sur les maisons inoccupées à Vancouver), essentiellement si la propriété n'est pas normalement habitée par le propriétaire ou un locataire;
  • en Ontario, une taxe sur la spéculation de 15 % pour les non-résidents lors de l'acquisition de propriétés immobilières dans la région élargie du Golden Hoseshoe (soit la région du Grand Toronto et les régions à l'est et à l'ouest, y compris London) s'applique essentiellement lorsque le cessionnaire est une société étrangère ou un particulier qui est ni citoyen ni résident permanent du Canada.

Ces taxes sont en plus des droits de mutation habituelles.  Peut-on croire que ces nouvelles taxes sur les achats par des non-résidents s'appliqueront au Québec dans un proche avenir?  Il s'agit certainement d'une possibilité, puisque depuis au moins 2018, le gouvernement du Québec affirme que l'acquisition de propriétés immobilières par des non-résidents est un phénomène mondial, laquelle a une incidence potentielle sur le marché immobilier, notamment en regard de l'augmentation importante du prix de maisons, et que la C.-B. et l'Ontario ont adopté des lois pour limiter ce phénomène, et le Québec prévoit procéder à des modifications législatives afin de permettre la collecte de statistiques pouvant faire la lumière sur la question au Québec.

Ces modifications législatives sont entrées en vigueur au Québec le 1er octobre 2020 en tant que règlement applicable aux droits de cession immobilière (soit les droits de mutation ou de bienvenue) et s'applique aux actes de cession soumis au Registre foncier (les modifications ne s'appliquent pas aux cessions hors titres déposées auprès de la municipalité visée, plutôt qu'au Registre foncier).  Le gouvernement du Québec en tirera certainement des données statistiques, puisque le cédant et le cessionnaire devront remplir un formulaire (lequel sera transmis au Registre foncier mais ne sera pas enregistré publiquement en regard du titre) incluant des renseignements sur leur résidence.  Essentiellement, voici les renseignements qui devront être fournis :

  • les particuliers devront indiquer leur citoyenneté ou statut de résident permanent;
  • les sociétés et fiducies devront préciser où elles ont été formées et leur lieu de résidence;
  • les sociétés en nom collectif devront indiquer où elles ont été formées et si au moins la moitié de ses membres sont des étrangers, soit des renseignements qui ne seraient pas autrement connus du fait que le droit privé québécois traite essentiellement ces sociétés comme une entité distincte; et
  • les sociétés en commandite devront indiquer où elles ont été formées et si le commandité est un étranger.

Il est intéressant de noter qu'aux termes de ce nouveau règlement, les cessionnaires de propriétés immobilières qui sont des particuliers devront préciser si le cessionnaire ou un membre de sa famille a « l'intention (...) d'occuper (...) un logement de l'immeuble à titre de résidence principale ».

Cela va au-delà des renseignements anciennement requis pour enregistrer un acte immobilier au Québec (il suffisait simplement d'« identifier » les parties; généralement le nom et l'adresse étaient fournis).

Le gouvernement a fait preuve d'une certaine souplesse : ces nouveaux renseignements ne sont pas requis d'un cédant qui est une succession ou d'un débiteur aux termes d'un recours hypothécaire ou d'une exécution forcée d'un jugement.

Ces nouvelles règles constituent une autre étape prise à l'échelle mondiale afin de promouvoir la transparence dans les opérations commerciales et celles des consommateurs.  Les raisons d'une telle transparence sont nombreuses (réduire la spéculation et les hausses de prix injustifiées ainsi que lutter contre la fraude et l'évitement fiscal, le blanchiment d'argent, l'utilisation de produits de la criminalité et la fraude en général dans le secteur immobilier et autres), mais l'augmentation des coûts de l'opération (à un moment où plusieurs entreprises ne peuvent se le permettre) et une réduction de la vie privée sont des corollaires de ces nouvelles règles.

Si vous avez des questions concernant ce qui précède ou tout autre sujet, n'hésitez pas à communiquer avec le soussigné.

 

Une version antérieure de cet article a été initialement publiée par « The Lawyer's Daily »

( www.thelawyersdaily.ca), une publication de LexisNexis Canada Inc.


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