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La crise de la COVID-19 et la force majeure: il est urgent d’analyser vos droits et obligations

16 mars 2020

Par Laurent Debrun

Au Québec, la force majeure est définie à l’article 1470 du Code civil du Québec (le « C.c.Q. »):

  1. Toute personne peut se dégager de sa responsabilité pour le préjudice causé à autrui si elle prouve que le préjudice résulte d’une force majeure, à moins qu’elle ne se soit engagée à le réparer.

La force majeure est un événement imprévisible et irrésistible; y est assimilée la cause étrangère qui présente ces mêmes caractères.

Suivant le deuxième alinéa de l’article 1470 C.c.Q., un incident ou une crise doit être à la fois imprévisible et irrésistible pour devenir un cas de force majeure. Si les parties ne pouvaient, au moment de la conclusion d’un contrat, prévoir l’incident, il est probablement d’une nature imprévisible. Le critère est de savoir si une personne raisonnable pouvait le prévoir.

Le caractère irrésistible est cette force liée à l’évènement lui-même empêchant une personne de prendre des mesures raisonnables pour éviter que l’événement ne se produise. Cette irrésistibilité signifie que l’événement causant les dommages doit rendre absolument impossible l’exécution des obligations par le débiteur. La condition d’irrésistibilité n’est pas totale lorsque l’exécution des obligations par le débiteur est seulement rendue plus difficile ou plus onéreuse.

L’article 1693 C.c.Q. traite quant à lui de l’effet de la force majeure sur les obligations contractuelles :

  1. Lorsqu’une obligation ne peut plus être exécutée par le débiteur, en raison d’une force majeure et avant qu’il soit en demeure, il est libéré de cette obligation; il en est également libéré, lors même qu’il était en demeure, lorsque le créancier n’aurait pu, de toute façon, bénéficier de l’exécution de l’obligation en raison de cette force majeure; à moins que, dans l’un et l’autre cas, le débiteur ne se soit expressément chargé des cas de force majeure. La preuve d’une force majeure incombe au débiteur.

Selon l’article 1693 C.c.Q., le débiteur pourrait être libéré de son obligation du fait d’un événement de force majeure et peut également être libéré lorsque le créditeur n’aurait pu, de toute manière, invoquer l’obligation d’exécution en raison de l’incident. Le fardeau de la preuve quant au fait que la COVID-19 est un cas de force majeure repose sur le débiteur.

Par exemple, les mesures gouvernementales décrétées ces dernières heures constituent-elles un cas de force majeure, un fait du prince, une variante de la force majeure? En quoi peuvent-elles excuser l’inexécution d’une obligation? Si le locataire d’un local commercial se voit ordonné par les autorités gouvernementales ou municipales de fermer ses portes, est-il tenu au paiement du loyer durant la fermeture?

Vous devez penser à scruter votre contrat ou votre police d’assurance pour ainsi déterminer s’il contient ou non, à titre d’exemple:

  • une clause traitant de la force majeure et prévoyant une réduction des prestations ou la suspension de l’exécution du contrat;
  • SI une telle clause se trouve dans le contrat, celui-ci contient-il des exigences en matière de préavis ou de délai de préavis afin d’invoquer le bénéfice de la clause? SI c’est le cas, il est essentiel de les exercer sans délai et de préserver toute preuve contemporaine afin d’asseoir votre position par la suite.
  • d’autres dispositions de suspension ou de résiliation susceptibles d’être déclenchées du fait de la COVID-19? Ce serait le cas, par exemple, d’une obligation de livrer de l’étranger un bien ou de rendre un service intuiti personae à une date donnée alors que les vols internationaux sont suspendus.
  • des déclarations ou des garanties susceptibles d’être compromises par la COVID-19?
  • La COVID-19 a-t-elle déclenché certaines obligations d’information à l’égard de vos créanciers ou débiteurs?

La COVID-19 a-t-elle :

  • empêché ou retardé l’exécution du contrat, ou a-t-elle eu une incidence défavorable sur celui-ci?
  • eu pour conséquence d’augmenter sensiblement les coûts liés à l’exécution du contrat?
  • occasionné la violation potentielle du contrat et, dans l’affirmative, quelles sont les conséquences d’une telle violation. Le devoir de mitiger une perte continue de s’appliquer nonobstant un cas de force majeure.
  • eu pour conséquence de rendre l’exécution du contrat radicalement différente des engagements contractuels pris à l’origine?  
  • rendu impossible l’exécution d’une ou plusieurs obligations contractuelles?

Les parties à un contrat touché directement par la pandémie de la Covid-19 doivent également vérifier si elles détiennent une police d’assurance couvrant les pertes découlant de leur incapacité d’exécuter leurs obligations contractuelles en raison de l’événement imprévisible.  Dans l’affirmative, il est impératif de respecter les délais et les exigences de fond et de forme en matière de délai de préavis.

Les entreprises sont touchées de multiples façons et à des degrés divers par la crise de la COVID‑19. Par conséquent, il est important d’analyser les répercussions réelles ou potentielles que cette pandémie pourrait avoir sur vos activités, vos relations contractuelles, vos relations de travail et les droits des employés.

Pour pouvoir déterminer si une partie contractante peut être excusée de l’exécution de ses obligations contractuelles du fait de la COVID‑19, chaque cas doit être analysé selon ses faits propres. Compte tenu que le risque est désormais réel, que les gouvernements adoptent des mesures contraignantes, vous devriez étudier chacune de vos obligations et vos droits contractuels, revoir vos ententes de financement et polices d’assurance. Votre devoir d’information face à vos créanciers et débiteurs est accru en raison de cette crise majeure.

Nous sommes là pour vous conseiller.


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