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Quand est-ce qu'un tribunal québécois peut faire fi d'une « clause d'intégralité »?

22 janvier 2020

Invenergy Wind Canada c. Éolectric Inc.,  2019 QCCA 1073

http://canlii.ca/t/j138b

 

Invenergy produit et vend de l'électricité généré par des tours éoliennes. Éolectric trouve des sites adéquats, les recense, obtient les approbations réglementaires, puis perçoit des redevances d'Invenergy.

Les parties avaient négocié une convention complexe, laquelle fut modifiée par la suite. Un litige est survenu quant au droit d'Éolectric de recevoir certains paiements en rapport avec l'électricité produite sur des sites additionnelles.

La convention prévoit une « clause d'intégralité » et Invenergy maintient catégoriquement que cette clause empêche le tribunal de reconnaître dans la convention des modalités additionnelles ayant comme effet de modifier l'intention expresse.

La Cour d'appel nous rappelle que le droit civil est fondé sur la primauté du negotium (le contenu de la convention) sur l'instrumentum (le support matériel de la convention).

En termes simples, la règle veut que l'intention véritable des parties à une convention ait priorité sur leur intention déclarée écrite, même en la présence d'une « clause d'intégralité ».

La clause en litige se lisait ainsi :

« 21.   No other agreements.  The Purchase Agreement and the Éolectric Transaction Documents represent the full and complete agreement of the parties regarding the Project and subject matter hereof, and except for the further documents and agreements expressly referenced herein or therein or contemplated hereby, there are no other agreements, oral or written, with respect to the Project and subject matter hereof. This Purchase Agreement further supersedes the Memorandum of Understanding, dated May 5, 2003 between Seller and Purchaser solely in connection with the Project and subject matter hereof. » (soulignement ajouté)

Bien que ces clauses soient valides en vertu de la loi québécoise, elles ne s'appliqueront que si les parties se sont exprimées clairement dans la convention. Si l'instrumentum qui prétend comprendre la totalité des conditions des parties comprend une ambiguïté, le tribunal pourra alors outrepasser la clause d'intégralité afin de trouver le véritable negotium par tout moyen de preuve recevable.

La Cour d'appel s'est ensuite penchée sur la nature de la relation d'affaires ainsi que la portée de la convention modifiée et a conclu que cette preuve, autrement inadmissible en raison de la clause d'intégralité, indique que la convention ne reflète pas le véritable negotium, soit l'entente conclue.

La Cour d'appel réaffirme qu'en appel, il faut faire preuve de réserve quant à l'interprétation par un juge d'instance d'une convention comprenant un langage ambigu. À défaut d'une interprétation gravement et manifestement déficiente d'une convention, la Cour d'appel ne modifiera pas les conclusions du juge d'instance, même si cela résulterait en une interprétation contraire mais également soutenable. Les parties à une convention incluent souvent une clause d'intégralité précisément pour éviter qu'on se fie sur une preuve extrinsèque pour modifier les conditions.

 

Cet article a été publié initialement sur Thelawyersdaily.ca

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