Catégories

Droit fiscal

Partager

Retour
Droit fiscal

Pratiques de règlement des contestations par l'Agence du revenu du Québec examinées par le Protecteur du citoyen

24 mars 2020

Par Frédéric Delisle

En décembre 2015, le Protecteur du citoyen (lien ici, version anglaise disponible ici) a publié son rapport annuel, une partie duquel traitait des différentes pratiques de l'Agence du revenu du Québec (l'« ARQ »). La section concernée du rapport annuel de 2015 du Protecteur du citoyen est disponible ici (version anglaise disponible ici).

Tel que précisé dans cette section du rapport annuel de 2015 du Protecteur du citoyen, certaines pratiques de l'ARQ ont été fortement remises en question, de sorte que la publication de ce rapport à donné lieu à un « plan d'action » publié par l'ARQ en réponse à celle-ci. Ce « plan d'action », disponible uniquement en français, peut être consulté ici.

L'aspect le plus significatif de ce « plan d'action » était la création de la Charte des droits des contribuables et des mandataires, disponible ici (version anglaise disponible ici).

Suivant la publication du rapport annuel de 2015 du Protecteur du citoyen, la publication du « plan d'action » de l'ARQ et l'entrée en vigueur de la Charte, d'après l'expérience du soussigné, certaines pratiques de l'ARQ qui existaient avant ont effectivement été modifiées, et il en est résulté une volonté accrue d'écouter et de collaborer pour résoudre les cas de manière plus juste et équitable. L'expérience du soussigné est partagée par maintes autres professionnels qui traitent avec l'ARQ, des professionnels dont la perception antérieure était, à tort ou à raison, bien moins favorable.

Le 27 février 2020, le Protecteur du citoyen a publié un rapport spécial traitant des ententes de règlement conclues entre des contribuables québécois et l'ARQ en cas de contestations. Un résumé analytique en anglais du rapport est disponible ici alors que la version française complète est disponible ici.

Dans ce rapport, le Protecteur du citoyen examine les diverses politiques, directives et considérations qu'emploie l'ARQ pour déterminer si une transaction (terme utilisé dans le rapport) devrait être conclue lors d'une contestation, le tout en application des articles 2631 et suivants du Code civil du Québec. Ce rapport ne traite pas des transactions conclues entre des contribuables québécois et l'ARQ en cas de vérifications ou au niveau judiciaire.

L'analyse de ce rapport et des conclusions sont malheureusement troublantes.

En 2000, l'ARQ avait publié une directive spécifique intitulée CMO-2976, Transactions conclues avec les contribuables et les mandataires en vertu des articles 2631 à 2637 du Code civil du Québec, laquelle a été mise à jour en 2009 et est disponible en français ici. L'alinéa 4.2.2 de cette directive, maintenant en révision suivant la publication du rapport du Protecteur du citoyen, prévoit spécifiquement ce qui suit :

« Lorsque les faits présents au dossier ne pourraient vraisemblablement pas, selon l'évaluation qu'en fait le fonctionnaire, soutenir la position du Ministère dans l'éventualité d'une contestation devant les tribunaux et que le Ministère ne peut, par ailleurs, constituer une preuve adéquate, le Ministère peut alors proposer ou accepter une offre de transaction du dossier. Cette offre doit être raisonnable eu égard aux circonstances du cas en l'espèce.

ll est possible que le Ministère puisse être en mesure de constituer la preuve nécessaire pour le traitement du dossier, mais que le travail exigé pour ce faire soit hors de proportion par rapport aux bénéfices qu'il peut en retirer. Dans de telles circonstances, le Ministère peut également procéder par voie de transaction. »

Ainsi, selon cette directive la position de l'ARQ était que si les faits appuyant la position adoptée par celle-ci étaient insuffisants, une transaction pourrait être envisagée. De plus, une transaction pouvait être proposée à un contribuable lorsque l'ARQ n'avait pas la preuve nécessaire pour appuyer sa position et l'obtenir serait trop coûteuse par rapport aux avantages qu'en tirerait l'ARQ.

Le Protecteur du citoyen, à juste titre, dénonce cette approche comme étant contraire au rôle et à la mission de l'ARQ, à savoir d'imposer les contribuables de manière juste et appropriée, rien de moins rien de plus. Tel que précisé par le Protecteur du citoyen, si une position adoptée par l'ARQ n'est pas soutenue ou est insoutenable, les nouvelles cotisations en découlant devraient être entièrement annulées, plutôt que faire l'objet de marchandage. Le soussigné irait même plus loin en suggérant que l'on pourrait mettre en doute la validité d'une « transaction » conclue selon une telle approche : une « transaction » comporte nécessairement des concessions réciproques des deux parties. On peut se demander si une partie fait vraiment une concession lorsqu'elle abandonne une partie d'une réclamation à laquelle est n'a clairement pas le droit.

Le rapport du Protecteur du citoyen examine également d'autres questions liées aux transactions conclues avec l'ARQ en cas de contestations, à savoir :

  • le consentement éclairé à la transaction n'est pas systématiquement examiné ou abordé;
  • toutes les conséquences résultant directement ou indirectement de la transaction, ou qui peuvent en suivre, ne sont pas systématiquement examinées ou abordées;
  • il ne semble pas y avoir de formation uniforme et adéquate pour les agents de l'ARQ qui sont permis de régler ces transactions.

En raison de ses conclusions, le Protecteur du citoyen a formulé huit recommandations en regard desquelles l'ARQ doit faire un suivi, y compris préparer un nouveau plan d'action et un échéancier pour sa mise en place. Ces recommandations doivent être mises en œuvre d'ici le 30 avril 2020. Dans cette même ordre d'idée, la directive CMO-2976 est en cours de révision. On espère que ces recommandations résulteront en un « changement de culture », tout comme la publication du rapport annuel de 2015 du Protecteur du citoyen.

En terminant, selon ce qui est précisé ci-dessus, de même que dans le rapport du Protecteur du citoyen et une section de son rapport annuel de 2015 traitant de l'ARQ, il est clair que pour les contribuables québécois qui doivent faire face à une contestation, il peut être difficile de s'assurer que leurs droits soient entièrement protégés et que la transaction conclue soit juste et impartiale. Il est donc clair que les contribuables québécois devraient considérer utiliser un professionnel fiscal aguerri. Si vous avez présentement besoin de conseils en regard de vos rapports avec l'ARQ, n'hésitez pas à communiquer avec le soussigné.

 


Catégories

Droit fiscal

Partager